Ils étaient là, alignés face à nous, en rang d’oignons. Serrés les uns contre les autres, pour qu’on puisse tous les voir.

Des corps fatigués, affaiblis par la maladie, en fauteuil roulant ou pas.

Des corps diminués, amputés parfois ou fort abîmés.

Des cœurs sans doute encore plus abîmés, par la maladie, la vieillesse, la perte d’autonomie.

Et puis il y avait Elle. Presque au milieu d’Eux tous.

67 années et combien d’années de souffrance. Trop sans doute.

Elle, si fragile, qui appelait les enfants sans arrêt, qui leur demande sans le dire de la rassurer : “WonderBoy, j’ai peur”, “WonderGirl, j’ai mal à mon ventre”…qui m’appelait aussi : “je n’y arriverai pas, je ne peux pas chanter”.

Et puis tous en place, ils ont commencé à chanter ces tubes old fashion, des années 70, des chansons françaises populaires. Beaucoup essayait d’y mettre de l’entrain, de la gaieté. Beaucoup aussi semblait perdu d’un coup, ne sachant plus quoi chanter malgré leur aide-mémoire.

Et puis ma mère, le visage caché derrière sa feuille “pour mieux lire”…je ne sais même pas si elle a vraiment chanté.

Et puis moi…le coeur serré, le coeur cabossé encore de la voir là. Je ne sais pas si je l’accepterai vraiment un jour.

Et puis d’un coup…un petit garçon est passé, entre Eux et Nous les spectateurs. Il était sur sa trottinette, tant d’innocence dans les œillades qu’il leur lançait, entre incompréhension en voyant ces âmes blessées et timidité. Leurs sourires à eux, attendris.

Me dire qu’eux aussi, pour la plupart, ont été aussi de jeunes enfants avec la vie devant eux….

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